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Statut des œuvres publiques en France

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This page is a translated version of the page Status of public works in France and the translation is 100% complete.

Proposition postée sur le wiki des Assises du Numérique: http://wiki.assisesdunumerique.fr/xwiki/bin/view/Assises/Diffusiondereproductionsdoeuvrespubliquessousdeslicencesdutilisationlibres

Statut des œuvres publiques vis-à-vis du droit d'auteur et des droits voisins : Perspective de Wikimédia France. Wikimédia France, association de droit français selon la loi de juillet 1901 dont les objectifs sont la diffusion de la connaissance libre et la promotion et le soutien des projets hébergés par la Wikimedia Foundation, considère comme très positif le lancement d'un plan de développement de l'économie numérique par M. Éric Besson, secrétaire d'État au développement de l'économie numérique. Les 27 pistes de travail indiquées dans ce plan sont intéressantes, mais nous souhaitons néanmoins proposer 6 mesures pour une politique nationale de valorisation des œuvres publiques.

En cette période de mutation des médias et de montée en puissance des communications électroniques, l’hésitation et la fermeture caractérisent les politiques de la France concernant les œuvres culturelles publiques. Ces politiques, sur le plan international, ne contribuent pas au rayonnement de la France, et sur le plan intérieur, ne résorbent pas la fracture culturelle, voire l’étendent.

La politique du gouvernement américain a été de diffuser le plus largement possible ses documents, notamment ceux décrivant ses performances aérospatiales. La conséquence est connue : omniprésence de l'action américaine dans les médias et la fiction, tandis que les organismes européens sont moins connus du grand public — le grand public connaît la NASA, mais le CNES ou l'ESA mériteraient d'être plus connus. La diffusion culturelle, quant à elle, évolue rapidement. Plusieurs grandes collections anglo-saxonnes (Library of Congress, Smithsonian Institution...) ont décidé de mettre des documents libres à disposition du public... Attendons-nous que, là aussi, ils soient repris partout avant de déplorer leur omniprésence ?

Nous proposons un changement radical d’optique, visant à ce que les difficultés de décision de l’administration ne puisse plus bloquer les usages ouverts, notamment sur Internet.
Alors que la diffusion restreinte et verrouillée est la règle, et la diffusion libre l’exception, nous proposons que la liberté soit la règle et la restriction l’exception. Nous proposons que les institutions culturelles et scientifiques françaises, et notamment les musées, diffusent des reproductions d’œuvres sous des licences d’utilisation libres. Cette diffusion servirait à la fois les besoins du public, et le rayonnement de la culture française à travers le monde.

Nos suggestions

Nous pensons que la faiblesse de la politique française en matière de statut et de valorisation des œuvres publiques est l’absence d’une ligne directrice ferme et réaliste. Chaque organisme est en grande partie laissé à lui-même, y compris les organismes pour lesquels la diffusion de documents est une activité très accessoire, de sorte que les politiques menées manquent de cohérence et de clarté. À titre de comparaison, la force de la politique du gouvernement américain est au contraire sa simplicité. Toute politique qui suppose une action raisonnée de la part des organismes pour autoriser la diffusion ou la réutilisation de leurs œuvres souffrira de l’indécision et de l’inaction des administrations. C’est pourquoi nous suggérons d’inverser le processus : une administration devra, si elle le souhaite, prendre une décision motivée de ne pas autoriser la libre réutilisation de ses productions. Afin d’éviter que des administrations ne passent par réflexe sous ce régime sans pour autant exploiter les œuvres qu’elles gèrent, ce qui serait un pur gâchis, cette décision devra être effectivement suivie d’effet.

Plus précisément, nous suggérons les dispositions suivantes :

Mesure 1. La règle sera simple : les documents produits par les organismes publics sont placés sous une licence libre, adaptée au droit français, donnant pour seule condition de réutilisation que l’œuvre soit clairement attribuée à ses auteurs et à l’organisme concerné (par exemple, une description d'une telle licence peut être trouvé sur le site des "Creatives Commons").

Mesure 2. Un organisme qui voudrait déroger à cette règle devra obligatoirement fournir à l’Agence du patrimoine immatériel de l’État (APIE) un dossier justifiant d’un intérêt patrimonial réel. Ce dossier devra préciser les fonds susceptibles d’exploitation, les clients visés par la commercialisation, les modalités et tarifs de vente, ainsi que les recettes attendues sur trois à cinq ans. L’APIE pourra refuser les dossiers qui ne lui semblent pas correspondre à un projet économique sérieux. Sinon, elle autorisera l’exploitation pour une durée de cinq ans au maximum, au bout de laquelle le dossier devra être réévalué notamment au regard des bénéfices produits.

Mesure 3. Chaque organisme, notamment ceux dérogeant à la règle de diffusion sous licence libre, devra indiquer clairement les conditions de diffusion et de réutilisation de ses œuvres sous la forme d’une licence choisie parmi une liste établie par l’Agence du patrimoine immatériel de l’État.

Mesure 4. L’APIE réunira une liste courte de licences libres et de licences adaptées aux usages dérogatoires. Ces licences devront être fournies à la fois sous une forme résumée et sous un code juridique précis, qui évitera les formulations imprécises comme « commercial » sans précisions, ou encore « libre de droits ». Ces licences ne comprendront pas de clauses superfétatoires et sources d’insécurité juridique, comme des interdictions de formes d’utilisations qui sont de toutes façon punies par la loi française. Nous suggérons les licences Creative Commons « attribution » et « attribution, réutilisation à l’identique » en version française. Nous rappelons que les licences Creative Commons « usage non commercial » et « interdiction des œuvres dérivées » ne sont pas libres.

Mesure 5. La possibilité d'une durée de droit d'auteur plus réduite (par exemple limitée à 20 ans) pour les œuvres produites par l'État et les organismes publics devrait être mise à l'étude.

Mesure 6. Nous pensons que la France et le gouvernement français ont un rôle essentiel à jouer sur le terrain culturel. La culture française doit avoir la place qui lui revient sur Internet, et ce tant à destination du public français que des publics étrangers. L’exemple américain montre qu’une large diffusion d’images du domaine public ou « libres », de bonne qualité, dans un domaine conduit facilement à une bonne représentation sur Wikipédia et d’autres sites Internet. Ces images, sur des sites bien référencés dans les grands moteurs de recherche, constituent une forme efficace et peu coûteuse de promotion à l'échelle internationale. Nous suggérons donc que les institutions culturelles françaises, notamment les musées, diffusent sous des licences libres des reproductions d’assez bonne qualité de leurs œuvres. Ils pourraient dans le même temps garder sous des conditions plus restrictives leurs documents à meilleure résolution, qui sont utilisées pour posters, éditions d’art et autres documents à forte valeur ajoutée. Ces reproductions pourraient être placées sur Wikipédia et Wikimedia Commons, et, selon les règles de ces sites, porteront toutes une identification claire de leur provenance. Une telle action serait « gagnant–gagnant–gagnant » :

  • Les musées verront leurs œuvres présentées dans les biographies des artistes et dans les descriptions de courants artistiques. Leur renommée nationale et internationale ne pourra qu’en être accrue, ce qui constituera de fait une publicité gratuite pour eux.
  • Wikipédia sera enrichi grâce au contenu des institutions françaises.
  • Le public français et étranger aura un meilleur accès à la culture française.

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